Iron Sky

(Iron Sky)

 L'histoire

30 avril 1945. Adolf Hitler vient de se suicider et l'Allemagne est au bord de la capitulation. Mais depuis plusieurs années, le programme spatial nazi travaille déjà sur une technologie ultramoderne dans le plus grand secret : l'anti-gravité. L'Allemagne est battue mais plusieurs centaines d'individus triés sur le volet parviennent à s'enfuir sur la Lune à bord de gigantesques aéronefs.

73 ans plus tard, en 2018, la Président sortante, Sarah Palin – co-listière du candidat républicain John McCain en 2008, réputée pour son conservatisme – veut s'offrir un nouveau mandat de 4 ans à la maison blanche. Son équipe de campagne la persuade d'envoyer un homme sur la Lune. Cet exploit qui n'a plus été réalisé depuis 1969, la propulsera en tête des sondages. Et pour marquer le coup, il faudrait que cet astronaute soit noir : le premier homme noir à poser le pied sur la Lune ! James Washington, célèbre mannequin afro-américain, est sélectionné pour cette mission. Une belle surprise l'attend du côté de la face cachée de la Lune…

Base lunaire - Iron Sky
Base lunaire

Le petit mot du Doc

IRON SKY c'est sans doute le pitch le plus fou qu'ait engendré la science-fiction. Un pitch qui trouve son origine dans une bonne blague entre copains… La dire, c'est bien, la mettre en image, c'est mieux ! Mais vouloir mettre en images une idée aussi culottée pouvait très rapidement tourner au désastre. IRON SKY montre s'il en faut qu'il n'est pas nécessaire de dépenser des centaines de millions de dollars pour aboutir à une production digne de ce nom. Et contrairement à ce que l'on pourrait penser, l'exploit ne vient pas d'Hollywood, mais de la Finlande !

L'idée de ce film vient de Jarmo Puskala qui avait participé au scénario de STAR WRECK, une série de 6 fan-films, 6 courts et moyens métrages réalisés par des fans de STAR TREK et qui trouve son apogée avec le long STAR WRECK: IN THE PIRKINNING, une parodie bon marché mais en qui dit déjà long sur le potentiel de cette équipe nordique. A sa tête, Timo Vuorensola. Chanteur dans un groupe de Métal et grand fan de la licence de Gene Roddenberry, il se lance dans les années 90 dans cette folle envie de faire son cinéma de science-fiction. Porté par Internet, STAR WRECK: IN THE PIRKINNING sort en 2005 et devient un véritable succès bien que possédant un budget proche de zéro. Pourquoi alors s'arrêter en si bon chemin ? Le prochain film traitera de nazis expatriés sur la face cachée de la Lune, de retour en 2018 !

Renate et Klaus à l'assaut de la Terre - Iron Sky
Renate et Klaus à l'assaut de la Terre

Timo Vuorensola sait qu'il faut rassembler un minimum de budget pour que le film soit crédible et dépasse le statut d'expérience étudiante. Combien de films de science-fiction ont été par le passé construits sans aucun effet spécial, sans aucune maquette, sans même aucun extra-terrestre à la forme inhumaine. Ah qu'il est facile de dire que l'envahisseur a pris possession des corps terriens pour diminuer les coûts de production! Qu'on se le dise, ce genre de magouille n'a pas lieu ici. Les Nazis reviennent de la Lune et visuellement Timo Vuorensola a décidé de ne pas reculer devant la difficulté. "Je voulais vraiment retrouver tout le plaisir de ces histoires, de ces batailles spatiales que je n'avais plus vues depuis trop longtemps", explique le réalisateur.

Alors que la recherche de financements traditionnels avance sur la scène internationale, Timo et son équipe mettent parallèlement un système de participation communautaire (le crowd funding) à la manière de ce qui avait été fait pour STAR WRECK, mais de façon plus importante encore. La production donne la possibilité aux internautes d'investir dans le film et d'en acquérir des parts avec comme mot d'ordre "dès que le film commencera à gagner de l'argent, les internautes en profiteront directement". Le résultat est impressionnant et dépasse toute attente. 1,2 millions de dollars sont récoltés, ce qui est largement plus que ce que les organismes du genre de Kickstarter auraient pu leur proposer. Energia Production (la société fondée pour l'occasion) parvient au total à rassembler 7,7 millions d'euros, soit près de 10 millions de dollars de budget, ce qui fait d'IRON SKY le film finlandais le plus cher de tous les temps. Au-delà de la participation des internautes, le financement provient majoritairement de Finlande, d'Allemagne et d'Australie. Il faudra tout de même 4 ans pour rassembler ce budget et pallier les réticences et la méfiance des investisseurs.

Sarah Palin brigue un second mandat - Iron Sky
Sarah Palin brigue un second mandat

Histoire de ne pas se rendre ridicule et d'éviter l'erreur STAR CRUISER (2010), il est décidé de tourner en anglais et d'engager des acteurs professionnels, seuls garants d'une véritable crédibilité. La belle Julia Dietze (née à Marseille) joue Renate, chercheuse et enseignante qui inculque à la jeunesse aryenne les valeurs du national socialisme : nul doute qu'IRON SKY va lui ouvrir en grand les portes de prochaines productions. Götz Otto, bientôt à l'affiche de CLOUD ATLAS (2013), joue son futur mari, Klaus Adler, un surhomme nazi et aryen qui a l'ambition de devenir le prochain Führer. Un Führer joué par Udo Kier qui n'est autre que le Baron Frankenstein dans CHAIR POUR FRANKENSTEIN (1973), Dracula dans DU SANG POUR DRACULA (1974) ou l'aide de camp de Pamela Anderson dans BARB WIRE (1996). Plus récemment il jouait dans MELANCHOLIA (2011) de Lars Von Trier. Christopher Kirby, vu dans THE MATRIX RELOADED (2003), MATRIX REVOLUTIONS (2003) et sénateur dans STAR WARS : EPISODE III - LA REVANCHE DES SITH, interprète le premier astronaute noir : James Washington.

Tourné en Allemagne et en Australie, IRON SKY s'impose surtout par la qualité de son design. On doit le "look" du film au directeur artistique Jussi Lehttiniemi. Avec ses structures énormes au design brut, froid et imposant, le style rétro futuriste (la technologie basée sur la mécanique de 1945 est encore exploitée en 2018) qui rappelle CAPITAINE SKY ET LE MONDE DE DEMAIN (2004) est à marquer d'une pierre blanche : une base lunaire en forme de croix gammée, side-cars et uniformes qui n'ont pas changé d'un pouce durant ces 70 dernières années. Et cette Coccinelle Volkswagen qui entre clin d'œil et touche d'anachronisme ajoute au côté technologiquement dépassé de cette néo-civilisation sélénite. Si les ordinateurs nazis assemblés de fils et de lampes tiennent encore dans des armoires, les nazis ont quand même construit une belle armada d'invasion. Parmi le flot de véhicules osés, on adorera les soucoupes volantes, tout comme ces extraordinaires Zeppelin porte-soucoupes… Ils sont fous ces finlandais !

Invasion - Iron Sky
Invasion

Côté scénario pas grand-chose à redire. Dans un film où les femmes tiennent les rôles principaux, on ne se prend pas au sérieux. Dans cette uchronie, les moqueries fusent à tout va, l'humour est omniprésent et flirte avec les limites du politiquement correct avec, en arrière-plan, un véritable message antifasciste.

IRON SKY n'est certes pas le film du siècle, mais un excellent moment qui a ouvert les portes à un nouveau réalisateur et à toute une équipe. Espérons simplement que cette nouvelle notoriété n'alterrera pas leur capacité à créer l'improbable de si belle manière.

05 mars 2013