Phantasm

(Phantasm)

 L'histoire

Dans la petite ville américaine de Morningsville, vit Mike, treize ans, orphelin depuis peu et particulièrement perturbé. Le choc est d'autant plus grand ensuite lorsque meurt Tommy, qu'il connaissait très bien puisqu'un des membres du trio musical de son frère aîné, Jody. Celui-ci, pense plus à son groupe de musique rock que de s'occuper de Mike. Qui n'a d'autre recours que de se confier à une jeune voisine qui vit avec son étrange grand-mère…

Car Mike est inquiet : lors des dernières funérailles, il a surpris, dans le cimetière (qu'il utilise comme parcours de moto-cross et territoire d'observations avec ses jumelles), et aux abords du vaste et marmoréen funérarium, les comportements incompréhensibles du croquemort, un être géant qui soulève un cercueil comme une boite vide ; et puis ces silhouettes sombres qui apparaissent et disparaissent soudainement entre les tombes…

Dans un premier temps délaissé par Jody, intrigué par les lumières, en pleine nuit, qui semblent errer dans la bâtisse des morts et l'immense parc qu'est le cimetière, Mike s'introduit un soir dans les lieux. Ce qu'il y découvre le terrifie : des nains de plus de cent kilos se cachent dans les locaux de l'entreprise de pompes funèbres, où des boules d'acier parcourent les couloirs en volant à toute vitesse, et qui percent le crâne de visiteurs importuns... La situation se complique lorsqu'il se trouve face au croquemort géant qui, blessé, présente un sang jaune ; et un doigt coupé qui continue à vivre !

Il va vite redire ses craintes à Jody, qui d'abord ne veut pas croire ces inepties, avant d'accepter ses soupçons. Malgré la confiance retrouvée de son frère, Mike, seul, retourne sur place, et découvre l'impensable, les terrifiants secrets d'êtres venus d'ailleurs….

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Le petit mot de Francis SCHALL

PHANTASM est indéniablement un film original, même si, avec les décennies et le débordement des effets spéciaux, nous avons vu depuis bien d'autres choses étonnantes. De rebondissements en rebondissements, entre lesquels diverses pistes sont proposées, Don Coscarelli nous embarque dans une mise en scène au pied de la lettre fantastique, en brouillant talentueusement genres et repères ; et… -mais nous ne le découvrons qu'après un fin ouverte- en multipliant les questions qui resterons sans réponses. Ce dernier point s'explique par ceci : PHANTASM est le début d'une saga que Don Coscarelli fera vivre jusqu'à 1998 en quatre films du même titre, simplement numéroté II, III, IV… (en 1979, 1988, 1994, 1998). Dans cette catégorie de narrations à épisodes, s'impose évidemment la saga de George Lucas, mais il faut bien admettre que rares sont celles écrites et tournées par un unique réalisateur, comme c'est le cas avec celle-ci ! Si, au fil des quatre films, l'ensemble s'avère inégal, le Tall Man1 (le croquemitaine croquemort géant) et ses sphères délétères resteront cependant inscrites dans toutes les mémoires.

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Particulièrement réputé outre-Atlantique, ce film, et ses suites, rencontra un beau succès en France où le premier opus fut présenté en avant-première mondiale en janvier 1979 au Festival d'Avoriaz, avant sa sortie en salle le 4 juillet 1979. Lors de cette célèbre manifestation des films de notre genre favori, il obtint le Prix spécial du Jury.

Dans plusieurs interviews Don Coscarelli remarque que sa référence est le film de William Cameron Menzies LES ENVAHISSEURS DE LA PLANETE ROUGE (Invaders from Mars), datant de 1953. Pourtant les ambiances qu'il parvient à créer ici, avec ses collaborateurs, sont toute personnelles… Deux paires de jambes dépassent de derrière une pierre tombale : nous sommes, de nuit, dans une nécropole. Un couple de jeunes gens batifole dans l'herbe entre les sépultures. L'extase ? Pas vraiment ! La belle sort un long poignard d'on ne sait où, et l'enfonce dans la poitrine de son partenaire… Au bout de 88 minutes endiablées, un géant ressuscité dans la chambre d'un préado fait voler en éclat la porte d'un placard et y entraîne le gamin, dans un sombre abîme… The end. Entre ces deux moments qui saisissent fortement le spectateur, pas un instant (pratiquement pas…) où le rythme va baisser. C'est à la fois une des réussites du film, …et son inconvénient. Car dans ce maelstrom d'actions (on y trouve de nombreuses cascades : les personnages cassent beaucoup de voitures, passent régulièrement à travers des bris de verre), si les idées ne manquent pas, elles n'ont guère le temps de se développer et se dispersent tous azimuts ; dommage ! Surtout pour la partie science-fiction (dont je dirai le moins possible, pour ne pas casser le suspense et les multiples interrogations qu'entraîne une atmosphère en permanence mystérieuse). Cette mise en scène brillante, trop brillante fini malheureusement par nous perdre entre les lignes d'un scénario très ambitieux. Trop d'actions tue la réflexion…

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Néanmoins, dans l'ensemble, PHANTASM est une notable réussite. En effet, son rythme, c'est-à-dire le montage, est également très soigné, rapide, violent parfois, souvent surprenant, installant un jeu d'incertitudes entre le réel, les rêves et les fantasmes (les voilà !). Le film bénéficie également d'un remarquable travail sur la photo (signé par le réalisateur lui-même), belles inventivités visuelles avec des images souvent nocturnes et déroutantes. Un ballet dément et sanglant. Cette volonté de violence s'inscrit franchement : nous sommes au milieu des années 70, le gore s'est installé allègrement ; pourtant ici –autant que concevable- avec une volonté d'esthétisme…

Bouillonnement d'images et de situations ahurissantes PHANTASM est un film culte aux USA. Au point qu'il est cité très souvent : son affiche apparaît dans de nombreuses productions ; autre exemple, dans AMERICAN GIGOLO de Paul Schrader (1980), il est annoncé au fronton d'un cinéma ; on le retrouve cité bien sûr dans des films d'horreur ou similaires, parmi d'autres : LES GRIFFES DE LA NUIT de Wes Craven (1984), et L'ANTRE DE LA FOLIE de John Carpenter (1994), etc.

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PHANTASM est aussi un film rare ! A revoir, avec quarante ans de distance, avec beaucoup de plaisir et d'intérêt ; et, conseil sincère à celles et ceux qui ne le connaissent pas encore : y plonger au plus vite !

Francis Schall

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1Don Coscarelli est lui-même très grand : 1,93 m. Est-ce une forme d’auto-portrait ?...

07 décembre 2012